Le groupe phare de la French Touch s'est produit auStade de France, ce dimanche 11août, pour la cérémonie de clôture des Jeux olympiques. Ils ont interprété «Playground Love», l'un de leurs titres phares, aux côtés de Phoenix, Angèle et Kavinsky.
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Voici l'histoire de ce duo, qui fêtera l'année prochaine ses noces de perle (comprendre: 30ans). Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin sont les deux moitiés du groupe Airdepuis 1995. Et, comme dans tous les couples (artistiques), leur relation est faite de hauts et de bas, de passions et de tensions. Inspirationanglo-saxonne à la sauce versaillaise.
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Années 1980. De cette décenniel'histoire de la musique française retiendra peut-être les chansons d'Alain Bashung, de Michel Berger etFrance Gall, et certainement deJohnny Hallyday. Maisqu'écoutaient les adolescents d'alors, ceux qui voulaient se démarquer, ne pas faire comme tout le monde? Pouvaient-ils vraiment se passionner pour les anciennes icônes yéyé, les tubes commerciaux, ou était-ce déjà de la «musique à papa»?
Dans cet âge d'or – apogée de la distinction avant le conformisme de la vie d'adulte –, Jean-Benoît Dunckel baigne dans l'éclectisme. Il grandit en écoutant les compositions de Maurice Ravelcomme l'électro de Kraftwerk. Il admire aussi les grandes figures: le flamboyant David Bowie, le mélancolique Lou Reed ou encore la star de la provocIggy Pop.Nicolas Godin, quant à lui, se prend de passion pour lesBeatles – indétrônables –, puis pourla soul de Herbie Hanco*ck, la funk de Sly and the Family Stone. Bref, des influencesloin de la variété française en vogue à l'époque.
À LIRE AUSSI JBDunckel de Air: «J'ai le fantasme de devenir un demi-dieu» Nés en 1969, Jean-Benoît et Nicolasse rencontrent au lycée Jules-Ferry à Versailles. Les adolescents bouillonnent. Avec la même énergie, les mêmes envies.Ils forment Orangeavec deux copains d'alors, jouent du pop-rock – inspirationanglo-saxonne à lasauce versaillaise. Et rêvent, eux aussi, de devenir des icônes. Pour se donner les moyens de leurs ambitions, ils enregistrentquatre chansons dans une cassette et démarchentdes labels. Sans succès.
«Toutes les maisons de disques à Paris nous ont dit: On peut vousproposer un contrat, mais vous devrezchanter en français.” On a donc enregistré une chanson en français, qui sonnait très mal, se souvient Nicolas Godinauprès de Pitchfork.C'était tellement déprimant qu'on s'est séparés. La culture française et le rock ne font pas bon ménage. C'est comme le vin anglais!»
Moon Safari, un bol d'Air
Un échec qui échaude les lycéens. Le bac en poche, les chemins se séparent et les rêves se dissipent… ou presque. Après des études de mathématiques, Jean-Benoît enseigne la physique-chimieet pianote, le soir, dans des bars du Quartier latin. Nicolas étudie, quant à lui, l'architecture, tout en travaillantsur le premier album de Teri Moïse (1996)aux côtés d'Étienne de Crécy, autre figure phare de la French Touch.
Avides de création, les Versaillais se retrouvent finalement en 1997, pourquelques morceaux. Préfigurent déjà les grandes lignes de leur futur duo: une musique pop planante, constituée de claviers vintage et remplis d'effets électroniques à la Kraftwerk.L'EP Premiers Symptômesmarque donc la naissance d'Air.
Une évidence artistique, accompagnée d'un retour aux sources. Cette fois, dans un vieux studionon loin de Versailles, Nicolas et Jean-Benoît écrivent les dix chansons de Moon Safari (1998). L'album sera acclamé par la critique et deviendra l'une des œuvres majeures de l'histoire de la French Touch. Accompagné des musiciens de Phoenix, autre groupe versaillais de l'époque, Air interprétera sontitre «Sexy Boy» dans le monde entier. Un succès détonant et intemporel.
«On a eu conscience qued'un groupe un peu undergroundon allait se diriger vers quelque chose de plus pop, affirme Nicolas Godinau Point en 2016. Donc on est devenus un enjeu commercial pour les maisons de disques. On a perdu une espèce de liberté – les gens comptaient sur nous pour vendre des disques et faire des tournées alors qu'avant ce qu'on faisait n'avait pas de conséquences pour nous.»Si les critiques tricolores sont unanimes, l'album se vendra davantage en dehors des frontières que dans l'Hexagone.
La révélation mondialeThe Virgin Suicides
Tout s'enchaîne très vite: Air composedeux ans plus tardl'album The Virgin Suicides, bande originale du long-métrage éponymeréalisé par Sofia Coppola. Pour coller avec l'époque du film – les années1970–, les morceaux sont enregistrés avec une batterie, un orgue, une basse et un piano. D'aucuns y reconnaissent duPink Floyd, ou du Serge Gainsbourg. Si l'album porte encore la marque d'Airavec ses notes évanescentes, il en reste un peu plus «classique» que Moon Safari. Un disque marquant, qui sera récompensé d'une Victoire de la musique.
Mais, après ce «moment», les albums d'Air se succèdent sans forcément rencontrer le succès. Certains cartonnent, à l'instar de Pocket Symphony (2007) et surtout de Talkie Walkie (2004), le plus vendu, et de son single "Cherry Blossom Girl", qui reste l'un de leurs titres les plus écoutés. D'autres sont des échecs commerciaux patents, malgré, parfois, une reconnaissance critique. C'est le cas de l'expérimental10000Hz Legend (2001) ou du confidentiel Music for Museum (2014).
Au fil des années, laroutine s'installe etla relation patine. Et l'amitié se délite. En studio, les tensions auraient été si grandes qu'après 2014Nicolas et Jean-Benoît auraient décidéde limiter leurcollaboration artistique aux concerts. Leur dernier album (Twentyears), sorti en 2016, n'est en fait qu'une compilation anniversaire.Libres comme Air, les deux multiplient ainsi les projets en dehors du groupe – notamment cinq albums solos à eux deux –, sans retrouver la même reconnaissance.
À LIRE AUSSI L'ex-moitié du groupe Air sort un nouvel albumLes grands événements constituent-ilstoujours une occasion de serabibocher? Pour le 25eanniversaire de Moon Safari (1998), Air a repris la route des concerts à travers le monde… avant de clôturer les Jeux olympiques de Paris. Tout en apesanteur.